Le Teknival Wav est lancé sur le plateau du Larzac
Après des semaines de flying intensif, de listes de sound system dans tous les sens, de communiqué de presse, et d'articles, le Teknival s'est enfin lancé vendredi, et a rejoint un site mythique, celui là même qui avait déjà accueilli un premier Teknival il y a 20 ans déjà.
13h vendredi après-midi, la planète Tekno est en ébullition. L'infoline vient de tomber sur le répondeur et indique le parking du Décathlon d'Onet le Chateau comme point de rendez-vous. Surprise pour une partie des participants et des forces de l'ordre qui imaginaient l'évènement ce tenir dans l'Aude, suite aux propos incendiaires du préfet peu avant et à la communication volontairement floue des organisateurs. Très vite les différents convois stationnés dans la région se mettent en branle, et une longue file de véhicule finit par se rejoindre sur l'autoroute, provoquant quelques ralentissements.
Une fois arriver à Onet Le Chateau, une longue attente commence alors pour attendre un maximum de personnes afin d'arriver en nombre sur le site du Teknival. Petit à petit le parking ce rempli fortement et vers 18h30 le départ est donné. Direction le sud de l'Aveyron, à quelques encablures de là. Sur la route la file de véhicules s'allonge, et les gendarmes déploient un hélicoptère pour surveiller de près la destination de cette impressionnante transhumance.
Aux alentours de 20h, 20h30, le convoi arrive sur place, au 1789 arbres de la Liberté, à proximité du Rajal del Gorp, sur la D809, près de Millau. Un lieu choisi pour "sa symbolique", comme l'explique "Barouf", porte-parole d'un des collectifs organisateurs.. C'est en effet à cet endroit qu'ont été plantés 1 789 arbres pour le bicentenaire de la Révolution. "Liberté, égalité, fraternité : nous incarnons ces valeurs", ajoute t-il.
Tout un symbole avec ce retour aux sources également pour ce Teknival qui se veut engagé avec des revendications comme l'arrêt immédiat et définitif des saisies de matériel et abrogation de la loi Mariani, l'arrêt immédiat des procédures abusives contre les sons et les participants. Et au-delà de l'aspect purement répressif, les sound system demandent également une voie légale pour organiser leurs soirées notamment via la possibilité d'avoir accès aux terrains publics inutilisés et exploitables pour y installer des fêtes ainsi qu'un vrai changement dans la façon dont les mairies accueillent les collectifs quand ils sont contactés pour organiser une soirée, afin d'éviter les près de 80% de refus essuyés lors d'une enquête de testing en 2014. Pour finir et afin de pouvoir faire preuve de responsabilité auprès de tous, un vrai soutien pour les actions de réduction des risques est demandé. Il faut soutenir et aider et non punir les usagers de drogues qui pourraient fréquenter ces lieux de fêtes, dans la même idéologie qui a accompagné l'arrivée des salles de consommation à moindre risque en France. Enfin certaines revendications portent, elles, sur l'esprit du Teknival, qui se veut propre avec un impact écologique mineur, comme lors du Teknival du 1er mai à Salbris. Mais le Teknival se veut aussi un espace d'autogestion où chacun est invité à participer au bon déroulement de la fête, en ramenant sac poubelles, eau et nourritures et en se montrant respectueux au maximum du spot qui accueille la manifestation.
Une fois sur place donc, mauvaise surprise, l'entrée du site est obstruée par de grosses pierres empêchant d’accéder au lieu. A cela s'ajoute un barrage de policiers qui interdisent aux raveurs de pénétrer sur zone. Le bras de fer commence alors entre forces de l'ordre et teufeurs. Après des heures d'attente et alors que la file d'attente grandie a vu d’œil, bloquant une partie de l'autoroute, les négociations aboutissent enfin. Là, vers 23h, Louis Laugier préfet de l'Aveyron donne son accord au Teknivalier pour investir le site, les barrages sont levés, les pierres dégagées, le Teknival est lancé quoique seul l'accès au site soit autorisé et non le Teknival, petite subtilité juridique importante..
Commence alors une folle nuit, avec des embouteillages et bouchons sur une dizaine de kilomètres, mettant une grande partie de la nuit à se résorber. Le site investi quand à lui est situé sur le plateau du Larzac, sur une grande surface herbée et comportant assez de végétation pour offrir un écrin parfait aux participants. C'est d'ailleurs dans la même zone qu'eut lieu le premier Teknival du 15 août, il y a 20 ans maintenant en 1996. Avant qu'en 2003 un autre Teknival ne revienne s'y installer. L'Aveyron réaffirme donc sa place de région centrale dans l'histoire du mouvement FreeTekno.U.F.O.T @ #Teknival 1996 - Millau
— Bass Expression (@BassExpression) August 12, 2016
20 ans après, nous sommes toujours là, prêt à foutre le souk !! pic.twitter.com/xguuMJe00x
Après une nuit à déballer, monter et régler les sound system, samedi matin aux premières lueurs du jour quelques façades étaient déjà installées. Ainsi les Haztek BTP Artkaid Sismik (1ère photo) ont pu sortir une muraille impressionnante d'au moins 50 kw, tandis que la coalition annoncée ici même entre les Monolith - Farfa-D - Ktaklizme - SKF (2eme & 8eme photo) a pu également sortir un gros bloc homogène. On retrouve également une grosse coalition L'Hallucidité, Tchapakan, KRMS autour de 60kw Exekut Acoustics (5eme, 7eme et 10eme photo) et une autre Mental Resistance- Tribu K-Tare - IRM avec sub en Clearsound (4eme, 6eme, 11eme photo). On dénombre ainsi 7 gros sound system installés ainsi qu'une multitude de plus petit murs composés de quelques caissons seulement qui parsèment le site. A cela s'ajoute de nombreux stands qui ont pris place sur le spot, proposant restauration et articles divers.
En face de la plus grande façade sonore, les bénévoles de plusieurs associations (Korzeame, Médecins du monde, AIDES, Techno +, Bus 31-32) ont installé leur campement. Jusqu'à lundi soir, ils vont mener des actions de préventions, de sensibilisation et d'aide sur le site. «Nous sommes pour la plupart issus du milieu des free-party et du monde techno. Ici notre rôle va être de pouvoir informer les participants sur la drogue, l'alcool, les MST. Ça va se traduire par des distributions de flyers, de préservatifs et de pailles à usage unique pour la consommation par voix nasale. Le but étant d'éviter les contaminations qui peuvent entraîner de graves maladies.
Un pharmacien diplômé d'État est présent dans notre équipe pour analyser les substances que les festivaliers peuvent nous amener. Ça permet d'échanger sur ces produits et voir ce qu'il y a dedans. Nous allons également accueillir ceux qui ont trop bu ou trop consommé au cœur d'une zone de réassurance, afin de les accompagner dans leur montée ou descente de drogue pour prévenir les différents risques», explique un représentant des différentes associations. Malgré cela une mineure de 15 ans ayant consommé alcool et drogues a été hospitalisé dans un état grave, alors que d'après la préfecture son état est désormais stabilisé et a pu regagnée le domicile familiale.. A cela s'ajoute une cinquantaine de personnes qui ont été prises en charge au poste de secours pour des malaises, ou blessures et 14 évacuées vers le centre hospitalier de Millau ainsi qu'une trentaine de prises en charge par des bénévoles du Centre d’Accueil et d’Accompagnement à la Réduction des risques pour Usagers de Drogues (CAARUD) pour des détresses psychologiques après consommation de drogues.
Et pendant que cette zone d'autonomie temporaire se met en place doucement les premières mauvaises nouvelles tombent. Malgré bientôt 72h sans incident, le maire de la commune, auquel la moitié du site occupé appartient a annoncé avoir porté plainte samedi midi, probablement contre x, aucun organisateur n'étant pour l'heure identifié. "Le préfet a autorisé l'ouverture du site, ce qui ne veut pas dire que la manifestation n'est pas interdite. Face à l'afflux de véhicules, il fallait prendre une décision. Nous sommes ici sur des terrains publics et privés, ce qui n'est pas sans poser de problèmes. Il y a également les risques sanitaires et la crainte d'un départ de feu. Notre rôle est maintenant d'assurer la sécurité" a expliqué, Bernard Breyton, sous-préfet de Millau. Tandis que les services de la préfecture ont ajoutés, par la voie de Dominique Consille, secrétaire générale, "que les teufeurs aient pénétré sans autorisation et en force sur le site" oubliant l'autorisation donnée par le préfet vendredi soir. Le tout en ajoutant que "C'est un festival sauvage. C'est jouer à la roulette russe avec la vie des gens", renouant par la même avec les propos du préfet de l'Aude, qui avait créer la polémique en qualifiant les organisateurs et participants de"Cons irresponsables" il y a quelques temps.#Teknival "C'est un festival sauvage. C'est jouer à la roulette russe avec la vie des gens"
— Bass Expression (@BassExpression) August 14, 2016
Trad : Vous êtes tous des cons irresponsables !
Parallèlement à cela des bennes à ordures ont également était déployées par la ville et les services de l’État samedi et une citerne d'eau pour prévenir d'éventuels feux de forêt a été installée au cœur du rassemblement dans l'après-midi dès le premier jour. En attendant les arrivées se tarissent fortement et concernant l'affluence sur le site, difficile d'avoir des chiffres précis, comme à chaque manifestation d'une telle ampleur. Du côté des autorités, on estime à 12 000 le nombre de participants au plus fort de la manifestation, un chiffre bien en-deçà des calculs des organisateurs, qui avancent le nombre de 6 000 teknivaliers dans la journée de samedi, entre 15 000 et 20 000 le soir, et enfin près de 30 000 dans la nuit de samedi à dimanche. "Un pic de 4 000 voitures" garées sur le site aurait été enregistré par la préfecture. Pour France 3, ce ne serait pas moins de 40 000 teknophiles qui auraient défilé en l'espace de quatre jours. Côté gendarmerie on compte 110 hommes déployés sur place avec une quarantaine de gendarmes de Millau, épaulés par un escadron de 70 gendarmes mobiles venus du Cher, ont relevés 56 infractions à la sécurité routière suite à leurs contrôles.
Suite aux fouilles organisées, par les douanes notamment, à l'entrée et à la sortie du site, deux individus ont été interpellés samedi, en possession d'un cocktail de stupéfiants. Ces deux hommes sont désormais sortis des locaux de la brigade de gendarmerie de La Cavalerie. Un autre participant a été mis en GAV suite à des coups et blessures volontaires sur un gendarme mobile (contusions diverses). Des produits stupéfiants divers et nombreux (herbe, héroïne, cocaïne, ecstasy, champignons hallucinogènes ...) ainsi que des armes (taser, battes de base-ball, harpon, couteaux, matraques, …) ont également été remis aux forces de l'ordre suite à des contrôles sur site. Point positif d'après Henriane une participante l'autogestion est vraiment de mise : "Le site est propre et devrais le rester, tout le monde a sa poubelle et 2 grosses bennes ont été déposées à l'entrée". Bien aider il faut le dire par la coupure quotidienne des sound system pour le nettoyage, qui a duré de 14h à 16h dimanche. Malgré tout alors que le Teknival touche à sa fin, de nombreux déchets jonchent encore le site, avant le grand nettoyage du jour qui permettra de rendre l'ensemble beaucoup plus agréable.
Lundi soir vers 17h déjà de nombreuses façades étaient démontés par les sound system, et qu'un grand nombre ont déjà quitté les lieux. Le Teknival qui projetait de s'éterniser en cas de non prises en compte de ces revendications a-t-il trouvé une oreille attentive ? Toujours est-il qu'après une réunion des collectifs, il a été annoncé qu'un accord avait été trouvé avec les autorités et que les sound system devaient coupés dans l'après-midi lundi et si on en ignore encore les contreparties, on peut supposer que les saisies seront évitées. Reste encore de nombreux raveurs sur place qui profitent du seul mur encore installés, celui des Haztek, avant de définitivement quitter ce magnifique plateau du Larzac, pour se rendre dans d'autres fêtes, dans d'autres lieux et continuer à partager cette passion électronique. Bilan bientôt.
Merci à Alili.
Bien entendu ce topic sera mis à jour durant toute la durée du Teknival en y ajoutant les informations importantes. N'hésitez pas à nous faire suivre toute information utile, photos ou vidéos ici ou sur nos réseaux sociaux.
Source : Midi Libre1,2, 3, 4, La dépêche 1, 2, 3, Le Point, France 3 -1, 2, CultureBox, YahooNews, Produc'Sounds, TraxMag, l'hallucidité, Farfa-D, Jules, Virginie, Sam, Alex, Maxime, Jeff, Henriane, Clément, Maxime 2, Teddy, Florian, Marie Lou, Cyril, Alexandre, Julian, Aurélie, Gabin & autres
Lire notre interview des organisateurs : https://www.bassexpression.com/viewtopic.php?id=8856